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Ma Gwada, dans tous ses recoins
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Ma Gwada, dans tous ses recoins
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17 janvier 2006

Guadeloupe, une terre gorgée de poison... No Comment!

Interdit depuis 1993, le chlordécone fait toujours des ravages. Cet insecticide ultra toxique a contaminé les sols et les rivières de l'île, plongeant les agriculteurs dans la détresse économique.

par Eliane PATRIARCA _ QUOTIDIEN :LIBERATION : vendredi 06 janvier 2006

Basse Terre envoyée spéciale

Nicole est endettée. Elle ne peut ni faire face aux factures, ni se reconvertir. Elle risque l'expulsion de son logement et s'inquiète pour l'avenir de son fils de 5 ans. Nicole, 37 ans, jeune agricultrice guadeloupéenne, est l'une des victimes de la contamination de l'île par le chlordécone. Aujourd'hui interdit, cet insecticide ultra toxique, utilisé contre le charançon du bananier, cancérogène probable et perturbateur endocrinien, a pourri pour des siècles les eaux et les terres antillaises.

En 1999, Nicole fait un emprunt pour acheter un terrain à Goyave, en Basse Terre. Sept hectares de semi mangrove sur lesquels, en 2003, elle plante des madères. En 2004, elle fait analyser ses sols, comme le préconisent deux arrêtés préfectoraux à tout agriculteur désireux de produire des légumes racines ou des plantes à tubercules.  Le couperet tombe : «Mes parcelles étaient contaminées. Mon terrain n'a jamais servi à la culture de bananes, mais il est situé en aval d'une bananeraie. Ce sont les eaux de ruissellement qui ont transporté le chlordécone.» Il lui est désormais interdit de vendre ses légumes. «J'ai dû laisser mes tonnes de madères en plan.» Depuis, le terrain est en friche et Nicole en galère. Pour ne pas craquer, la jeune agricultrice multiplie les courriers aux administrations, au préfet, à Jacques Chirac, à l'Union européenne...
    

La pollution des rivières guadeloupéennes a été décelés en 1999, par la direction départementale de la santé, mais c'est en 2002 seulemnt que les scientifiques et les autorités publiques saisissent l'ampleur du désastre. Les planteurs ont continué à utiliser ce poison pourtant interdit depuis 1993.L'insecticide, présent dans les sols antillais, a contaminé la chaîne alimentaire et peut se retrouver dans les assiettes, via les légumes cultivés dans la terre.

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La préfecture de Guadeloupe met alors en place des analyses de sol préventives et interdit la culture des légumes racines sur terrain contaminé. Sous la houlette du député martiniquais Philippe Edmond-Mariette, des parlementaires antillais obtiennent la création d'une mission d'information sur le chlordécone. Rendu public en juin 2005, leur rapport rencontre peu d'échos en métropole. Pourtant, les tribulations de l'insecticide aux Antilles se lisent comme un polar. Elles illustrent l'opacité qui caractérise l'homologation des produits phytosanitaires, et témoignent de l'influence d'une poignée de gros planteurs qui contrôlaient alors la filière antillaise de la banane.
Le Chlordécone appartient à la 1ière génération de pesticides, les organo-chlorés, ces polluants organiques persistants qui sont une plaie pour la planète.

5 ans aprés une catastrophe sur un site de Production en Virginie, le produit va être autorisé en France. Aprés le passage de 2 cyclones, les planteurs se disent démunis face à la prolifération du charançon.
             En 1981, le Ministère de L'agriculture accepte de le remettre sur le marché.! ! ! !

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Angoisses et convulsions 

Pourtant, la nocivité environnementale de l'insecticide est déjà établie. En 1977 et 1980, 2 rapports scientifiques avaient mis en évidence la pollution des rivières et des sols antillais, et la rémanence du produit. L'impact sur la santé humaine, lui, est mal connu. Sauf en cas d'exposition aiguë : les ouvriers de l'usine de Hopewell en Virginie ont souffert d'agitations, d'angoisses, de convulsions, de céphalées, de troubles hépatiques et de troubles de la spermatogenèse. On ignore en revanche l'effet d'une exposition chronique. Chez le rat, elle provoque des cancers, et endommage les organes reproducteurs. Mais aucune étude épidémiologique n'a été concluante chez l'homme. En 1979, la substance est néanmoins classée cancérogène probable par le Centre international de recherche contre le cancer.

Pourquoi la France prend-elle le risque d'autoriser ce produit ? A l'époque, rappelle la mission parlementaire, «les connaissances scientifiques étaient balbutiantes, l'attention portée aux potentiels effets néfastes des pesticides moins soutenue qu'aujourd'hui (...) et la notion de principe de précaution encore inconnue du droit».

Yves-Marie Cabidoche, chercheur de l'Inra en Guadeloupe, spécialiste de l'étude des sols, se souvient : «En 1981, (...) le chlordécone avait une réputation non usurpée d'efficacité. (...) La Guadeloupe avait essuyé plusieurs cyclones, le charançon proliférait. Les planteurs ont exercé une forte pression pour que ce produit soit disponible.» Il évoque aussi les rapports distants entre recherche, services de l'Etat et acteurs économiques. A l'époque, regrette-t-il, il existait pourtant des produits alternatifs, des organophosphorés dégradables, moins efficaces que le chlordécone mais qui auraient pu le remplacer. 

 

L'Etat pénalement responsable ? 

En 1989, la Commission d'étude de la toxicité des phytosanitaires préconise l'interdiction de l'insecticide, qu'elle juge «persistant, relativement toxique». Le ministère de l'Agriculture l'interdit en 1990. Mais les gros planteurs obtiennent deux dérogations : le produit sera utilisé jusqu'en 1993. La mission parlementaire émet les plus grandes réserves sur ces dérogations qui pourraient aujourd'hui engager la responsabilité pénale de l'Etat dans ce «Metaleurop agricole» .

Aujourd'hui, la Guadeloupe tente d'évaluer l'ampleur des dégâts. L'eau tout d'abord. En 1999, la DSDS de Guadeloupe sonne l'alerte : les rivières sont polluées, certains des points de captage d'eau potable aussi. Problème d'autant plus grave que c'est de Basse Terre, région des bananeraies, que proviennent 80 % des ressources en eau potable. En 2000, des mesures sont prises : captages fermés, stations de traitement d'eau potable équipées de filtres à charbon pour retenir les pesticides. Selon l'Inspection générale de l'environnement, en 2005, les eaux destinées à la consommation sont exemptes de chlordécone à plus de 99 %. Reste que la population antillaise a ingéré durant des années une eau et des aliments pollués.

Quant aux sols, Grande Terre est épargnée mais Basse Terre est fortement contaminée. Un sixième de la surface agricole, sont très pollués. Il faudra des siècles pour que les eaux parviennent à le lessiver. L'insecticide, qui se dépose sur le sol comme une couche de vernis, s'est dispersé avec les labours en millions de copeaux dans une grande épaisseur de terre.» Et nul ne sait dépolluer ces sols dont l'usage est désormais très restreint. «On peut y faire encore de la banane ou de la canne à sucre, le transfert de l'insecticide de la terre aux arbres fruitiers n'ayant pas été observé.»

Un tiers des femmes enceintes contaminées 

La Confédération paysanne et les syndicats affiliés aux Antilles réclament l'indemnisation par l'Etat des victimes. Mais le préjudice global est difficile à évaluer, les agriculteurs n'ayant pas tous fait procéder à l'analyse de leurs sols. En outre, la publication en octobre par l'Agence française de sécurité alimentaire de limites acceptables de chlordécone dans les produits les plus consommés, sans risque pour la santé des consommateurs, devrait permettre à certains agriculteurs dont les terres sont peu contaminées de continuer à travailler.

Plusieurs études épidémiologiques, coordonnées par Luc Multignier, épidémiologiste de l'Inserm à Rennes, tentent de cerner l'impact sanitaire de l'exposition au chlordécone, et les éventuels liens de causalité avec certaines pathologies. «La première, fondée sur des analyses de sang, a confirmé qu'une importante fraction de la population ­ deux tiers des ouvriers agricoles et un tiers des femmes enceintes ­ est contaminée, explique-t-il. Ce n'est pas surprenant, puisque l'eau et les aliments sont pollués. Mais nous ignorons si ce niveau de contamination est dangereux.»

Deux autres études sont en cours : Timoun, qui piste les effets du chlordécone sur le développement intra-utérin et postnatal à partir du suivi de 1 200 grossesses et des sept premiers mois des bébés. Et Karu-Prostate, qui traque les liens avec le cancer de la prostate. «On observe en Guadeloupe un taux de prématurité et de mortalité périnatale deux fois plus élevé que celui de la métropole, et l'une des incidences de cancer de la prostate les plus élevées au monde, qui ne s'explique qu'en partie par l'origine ethnique de la population.»
Les 
résultats de ces études ne sont pas attendus avant 2007.

En attendant, les Guadeloupéens doivent se débrouiller avec leurs angoisses.

Source : Libération

Ma Gwada, côté scandale !!

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Commentaires
G
Mon cher Sloti, des Guadeloupéens se sont enfin réveillés et ont fait de premières démarches en ce sens.. Espéront que l'Etat français prendra ses responsabilités... Encore une fois no comment!
S
a quand une levée de la population pour une commission denquete parlementaires, des experts indépendants, le remplacement de la banaane, et l'indemnisation??
Ma Gwada, dans tous ses recoins
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